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démocratie et administration

"par Poisson"

Je crois que le harcelé doit développer une psychologie de combat pour supporter son calvaire.

Il me semble que pour tenir,

Il faut se dire qu'on se bat pour défendre sa liberté, son intégrité contre l'oppression, la bassesse, la vulgarité.
Il faut élargir notre pensée au delà de notre seule personne, pour ne pas nous isoler.
Il faut se dire que le harcelé est toujours une personne d'une meilleure valeur intellectuelle et morale que le harceleur, qui n'est finalement que l'expression de la médiocrité.
Il faut entretenir ce dédain aristocratique. Il nous protège, et c'est ce qui blesse le plus un "pervers narcissique".


Je fais l'objet de mesures particulièrement "inconfortables" depuis plusieurs années. Observateur privilégié d'un phénomène récemment pris en compte par notre droit positif

(art. 6 quinquiès LOI n° 83-634 du 13 juillet 1983 Loi portant droits et obligations des fonctionnaires, Art. 222-33-2 du Code pénal),

j'ai développé une réflexion qui m'a permis de supporter cette épreuve. Je la soumets à tous ceux qui en auraient besoin, dans l'espoir qu'elle leur soit profitable.

Le harcèlement naît de la confrontation d'une conscience et d'une apparence.

La fonction publique gère des services déficitaires, ou se charge des fonctions régaliennes de l'Etat. L'absence d'obligation de résultat comptable engendre une conception hiérarchique fondée exclusivement sur l'exercice du pouvoir. La légitimité de l'autorité relève donc uniquement de la réussite d'un concours, qui conditionne la carrière du fonctionnaire.

L'anonymat confortable de l'administration, qui favorise l'impunité par la dilution des responsabilités que génère la multiplication des niveaux hiérarchiques, et son organisation bureaucratique permettent malheureusement à la pratique du harcèlement de prospérer ; d'autant plus que l'absence de chalenge, d'objectif favorise l'indifférence, l'individualisme.

La victime du harcèlement s'interroge rapidement sur la réalité des principes de droit. Elle constate leur caractère théorique et leur incapacité à empêcher les excès.

Le harceleur apparaît sous les traits d'un "collabo" moderne, qui n'a pas l'excuse d'une occupation militaire étrangère pour persécuter son "Juif".

L'appartenance du harceleur à un appareil d'Etat fait que son comportement déteint sur l'organisation administrative. Le phénomène de réseau très fort dans l'administration amplifie le sentiment d'impunité qui permet le harcèlement.

Le harcèlement moral est une forme lâche de confrontation.

Le harceleur n'est pas courageux, il n'attaque pas de front, surtout quand il sent une résistance.

Il excuse sa stratégie d'anéantissement par l'application bornée du règlement.

Son action conduit à l'épuisement physique et psychologique de la victime. C'est une logique de travail forcé, dont l'aboutissement peut être fatal. "Arbeit macht frei".

Le harcèlement naît du danger que représente le harcelé pour le harceleur

(du fait d'une supériorité réelle ou supposée à propos du savoir, du savoir faire ou du savoir être).

Les capacités attribuées au harcelé laissent craindre une trop grande autonomie, une zone d'incertitude susceptible de menacer l'autorité du hiérarque.

Le harcèlement peut être aussi la conséquence d'une frustration, d'une angoisse, d'un sentiment d'infériorité du harceleur.

Il ressent le harcelé comme une menace susceptible de mettre en évidence ses insuffisances, son imposture.

Le harcelé doit résister en développant rapidement une psychologie de combat. Il doit élargir sa réflexion au-delà de sa personne. Il doit s'imprégner des principes qui sont mis en causes par le harcèlement moral : respect de la personne, liberté, démocratie.

Il doit adopter le dédain aristocratique. C'est ce qui blesse le plus un "pervers narcissique".

Le harceleur est la négation de la modernité, l'expression d'un arriérisme.

La résistance au harcèlement repose sur la préservation des preuves. Le harcelé doit conserver la trace des évènements (tenue d'un agenda, copie des pièces témoignant des atteintes dont il fait l'objet).

"Ne rien faire" livre le harcelé, sans aucune défense, aux abus du harceleur. Le harcelé doit ménager des arguments pour défendre ses droits (rédaction d'un rapport sur les dégradations des conditions de travail).

Sinon la justice ne pourra pas sanctionner ceux qui se livrent au harcèlement. D'où l'importance pour le harcelé de prendre conscience du processus le plus tôt possible et de bien constituer son dossier.

Le harcèlement moral dans la fonction publique revêt une dimension politique.

Si ce phénomène stigmatise l'absence de respect de la personne humaine ; les faits témoignent de l'absence de sincérité dans le respect affiché de ces principes au sein de l'administration de la République française. L'étendue du phénomène prouve même que le totalitarisme y garde, au travers des harceleurs, de nombreux partisans potentiels.

Toutefois, le danger ne naît pas seulement du harceleur mais aussi de l'absence de réaction des témoins (par intérêt ou par lâcheté).

En effet, la démocratie se mesure aussi au travers de l'esprit critique et de la capacité d'indignation de chacun.

La prolifération du harcèlement moral dans l'administration prouve le peu de conscience, à ce sujet, des fonctionnaires.

Le respect de la personne humaine a une valeur constitutionnelle. Le chef de service est responsable de ce qui se passe dans son service. Il commet une faute d'une exceptionnelle gravité, une faute personnelle, s'il n'intervient pas. Cette faute devrait être consacrée par les textes et sanctionnée par la révocation, puisque le statut de la fonction publique impose aux fonctionnaires l'honneur et la probité.

Le droit sur le harcèlement est en avance sur les mentalités, comme ce fut le cas pour l'avortement, la répression du sexisme, même du viol encore. Cette avance du droit sur les mentalités s'explique aisément par la genèse de la répression du harcèlement moral, né d'une étude scientifique

(lire les ouvrages de madame marie France Hirigoyen sur le harcèlement qui sont publiés en livre de poche - lire aussi le dernier ouvrage de Boris Cyrulnik sur le phénomène de résiliance qui offre une bonne base de réflexion pour résister au harcèlement).

Enfin, l'absence de couverture médiatique sur le harcèlement, comme il y en a une (récente) sur la violence routière, marque bien l'absence de volonté politique.

Celle-ci s'exprime d'ailleurs par la carence d'une véritable gestion des ressources humaines dans l'administration, ce qui est contraire à toute exigence d'efficacité. Une conséquence de l'impunité du harcèlement dans l'administration est le coût élevé de la fonction publique et son mauvais rendement.

La dimension démocratique des institutions se mesure donc à l'aune du harcèlement moral dans la fonction publique. Il met les politiques face à leurs contradictions.

Code pénal : " Art. 222-33-2. - Le fait de harceler autrui par des agissements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel, est PUNI D'UN AN D'EMPRISONNEMENT et de 15 000 EUROS D'AMENDE. "

" Art. 6 quinquies. - loi no 83-634 du 13 juillet 1983 Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
Aucune mesure concernant notamment le recrutement, la titularisation, la formation, la notation, la discipline, la promotion, l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération :
1. Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa ;
2. Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements ;
3. Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés.
" Est passible d'une sanction disciplinaire tout agent ayant procédé aux agissements définis ci-dessus.
" Les dispositions du présent article sont applicables aux agents non titulaires de droit public. "

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