Manipulation, abus de pouvoir,
emprise, séduction,
où commence le harcèlement sexuel ?
(note de Rhmt : le prénom du patron a été changé, le nom de la victime ne sera pas mentionné, le témoignage sera sur ARTE à l'émissions DE QUOI JE ME MELE le mardi 12 août à 20h50)
Novembre 1988
J'ai rencontré Michel, mon futur patron, la première
fois en novembre 1988. J'avais les cheveux courts contrairement à mon
habitude. J'avais demandé au coiffeur de les couper en dégradé
mais de garder la longueur car ils étaient pour moi ma parure. Il m'avait
tout couper ! Ce détail n'a de l'importance qu'à la fin.
Je cherchais une place de secrétaire car j'étais sans emploi
et le dernier poste - que j'avais occupé pendant 6 mois - m'avait laissée
amère sur les relations entre collègues féminines. Je
ne supportais pas les nanas qui passent leur temps à critiquer les
autres, juste pour le plaisir de massacrer quelqu'un dans son dos sur n'importe
quoi. Je ne m'étais pas intégrée et j'en avais souffert
car j'avais fini par être tenue à l'écart et victime de
moqueries, ces mêmes moqueries auxquelles j'avais refusé de participer.
Je n'avais plus envie de travailler avec des femmes surtout des femmes mesquines
et jalouses.
J'étais jolie. Trop pour elles car beaucoup d'hommes me tournaient
autour que je savais gentiment remettre à leur place car j'étais
mariée.
L'entretien d'embauche
L'entretien a duré presque une heure. Etrangement,
je n'ai subi aucun test de dactylo ou autre. Michel a été très
cordial et il m'a promis une embauche pour le 1er janvier 1989. Il m'a surtout
promis de marquer sur le contrat que je serais bien "secrétaire
de direction" car si je l'étais souvent dans les faits, ce grade
n'était jamais inscrit sur mon contrat de travail.
J'ai travaillé au siège social d'une grande société,
comme simple secrétaire, jusqu'à fin décembre pour ne
pas rester au chômage et tenter l'expérience. Mais avant la fin
de ma période d'essai, j'ai démissionné car je n'avais
aucune perspective de carrière et l'ambiance était très
mauvaise à cause des éventuelles restructurations qui planaient,
pour venir travailler dans la nouvelle PME que créait Michel. Je savais
que mon salaire allait être très inférieur à ce
que le poste et ma qualification me laissaient prétendre mais Michel
m'avait promis un travail intéressant, et une augmentation progressive
et rapide de mon salaire. Je serai payée 6000 F brut au premier mois
mais dès la fin du 3ème je devais être augmentée
pour obtenir à la fin de l'année 8000 F brut. Il m'avait fait
miroiter la possibilité au fil des années de devenir cadre et
de gagner 10 000 F, plus que mon mari.
Le 2 janvier 1989
Le local était une maison individuelle dans un village
en pleine campagne pratiquement. Le jardin était immense et il y avait
l'atelier derrière la maison.
Mon bureau était dans la salle à manger qui composait pratiquement
l'unique pièce du rez-de-chaussée. Il y avait une salle de bain
avec WC et cuisine.
Au 1er étage il y avait deux chambres dont l'une était transformée
en bureau pour Michel qui était le gérant de la société.
L'autre pièce était vide. Un jeune commercial allait l'occuper
par la suite.
Il attendait de trouver un autre local digne de ce nom.
Les ouvriers étaient au nombre de 6 je crois. Nous étions 8
en tout.
Michel et moi étions les seuls à travailler dans la maison.
Dès le 1er jour, j'ai eu la désagréable surprise de constater
qu'il avait accepté de prendre une lycéenne en stage de secrétariat
que je n'avais pas matériellement le temps de former, j'avais moi-même
tant à apprendre et surtout tout à organiser. Mais Michel était
embêté pour moi et me fit des excuses. Il voulait juste lui rendre
service car elle n'avait rien trouvé d'autre. Il comptait sur ma compréhension.
Le 1er mois
Le 1er mois, Michel a été charmant avec moi.
Il était très poli, très respectueux. Il était
aussi très attentionné, soucieux de mon bien-être. Il
a même fait installer un verrou pour les toilettes juste pour moi et
un miroir.
Il me demandait souvent si j'allais bien, si je comprenais bien ce qu'il m'expliquait.
C'était la 1ère fois que quelqu'un était aussi gentil
avec moi au niveau professionnel ! Il m'enseignait un logiciel de gestion
et de comptabilité puisque je devais tenir les stocks, être à
même de renseigner un client sur sa commande
en plus de faire
du secrétariat de direction.
Il avait une patience infinie avec moi. Et j'apprenais très bien. Au
bout d'un certain temps, il m'a félicité sur mon travail. Je
prenais ses félicitations pour des encouragements et ça me faisait
chaud au cur. Il m'a dit que j'étais intelligente, que j'étais
brillante, que je comprenais tout très vite, que je le surprenais agréablement
par mes initiatives. Il se montrait fier de moi et je n'avais pas l'habitude
d'une telle attitude.
Le contexte
J'avais 27 ans. Michel n'était guère plus
jeune que mon père, presque la cinquantaine. C'était important
pour moi qui manquais de confiance en moi, de savoir qu'il était fier
de moi. Mon père ne m'ayant, à l'époque, jamais montré
qu'il était fier de sa fille.
Pour ne faire prendre de risque à cette nouvelle société,
il avait décidé de se passer de salaire pendant les deux premiers
mois. Et je l'admirais pour cela.
L'attitude de Michel me faisait du bien. Elle me redonnait confiance et mettait
du baume sur mes blessures narcissiques. Mes parents me manquaient. J'habitais
la région parisienne et eux le Sud. Je n'avais pas de famille et la
seule amie que j'avais, était partie en Bretagne. J'avais perdu la
foi en Dieu depuis de nombreuses années.
Je m'obligeais à suivre depuis peu, une psychothérapie avec
un psy en qui je n'arrivais pas à faire confiance.
Mon 1er enfant avait 21 mois. J'avais du mal à être mère
et je me sentais délaissée par mon mari qui était très
heureux d'avoir un fils. Il s'en occupait énormément.
Sexuellement ça ne marchait plus depuis l'accouchement qui ne s'était
pas bien passé. J'avais eu 16 points. Je n'avais plus envie d'avoir
de rapports et je les subissais plutôt qu'autre chose.
Fin de la période d'essai : février 1989
Au bout de la période d'essai pendant laquelle j'ai beaucoup travaillé, ne comptant pas mes heures et ne me plaignant pas de la panne de chauffage qui a duré une quinzaine de jours, Michel n'a pas souhaité renouveler la période d'essai. Il m'a dit qu'il était enchanté par mon travail, que je travaillais très bien et il voulait marquer sur mon contrat de travail que j'étais non pas " secrétaire de direction " mais " assistante de direction ". Pour lui c'était plus important mais je ne connaissais pas bien ce terme et j'étais tellement fière d'être enfin "Secrétaire de direction" tout comme indiqué sur mon BTS que j'ai préféré ce grade peut-être moins important. J'ai été augmenté de 500 F.
Méfiance
Il m'a avoué aussi avoir vérifié auprès de mon lycée technique de Bordeaux que j'avais bien réussi le BTS de secrétariat de direction. J'étais surprise qu'il ait pu faire ces vérifications. Il était heureux que la réponse soit positive. Il voulait être certain de mon honnêteté car beaucoup trichaient, ce que j'ignorais.
Physiquement, il me répugnait
Physiquement il était grand et costaud, un peu gras,
du ventre. Mais il était toujours en costume cravate, il présentait
bien. Il avait les yeux bleus mais un peu cachés par des lunettes.
Des cheveux châtains foncés, raides, coupés courts. Il
était très propre sur sa personne. Je n'aimais pas son visage.
Je trouvais qu'il avait un physique ingrat et sa peau un peu granuleuse me
répugnait. Il me déplaisait physiquement mais je le trouvais
tellement gentil que j'ai vite oublié qu'il avait un physique. De toute
façon il était mon patron.
Il continuait à me complimenter sur ma façon de travailler me
remerciant d'être au dessus de ses espérances. Il était
ravi de ne pas s'être trompé en m'embauchant. Je devenais accro
de ses compliments. Je n'aurais pas pu m'en passer facilement. L'ambiance
était excellente et j'étais ravie de travailler dans des conditions
idylliques ! Il était hors de question pour moi de briser cette relation
en faisant quoi que ce soit qui eut pu lui déplaire.
Il était courant que je travaille de 8h00 du matin à 18h-19h00,
sans de vrai pause repas.
Il m'arrivait quelquefois à 15h00 de m'apercevoir que je mourrais de
faim parce que j'avais loupé le repas de midi et je prenais ma voiture
pour aller me chercher un sandwiche au bar le plus proche.
Sa tactique
Michel a commencé à se rapprocher physiquement de moi. Il m'apprenait la gestion du stock, à faire des factures et à préparer la comptabilité. Il se mettait sur une chaise tout contre moi. Quelque fois il venait et il se tenait sur le dossier de mon fauteuil pour regarder par-dessus mon épaule en se penchant sur moi. Je sentais son eau de toilette, et je sentais presque son menton contre mon crane. Ou alors il mettait sa main sur mon épaule d'un geste naturel ou alors son bras frôlait le mien ou sa jambe frôlait la mienne. Je ne me rendais compte de rien. Il me considérait comme son adjointe et il ne me cachait pas qu'il voulait faire de moi son bras droit tout en me promettant une rapide et vertigineuse progression de carrière et surtout de salaire. Puis il a commencé à me faire des compliments sur mon physique. Il disait qu'il me trouvait très belle.
Belle
Que devais-je répondre à un tel compliment
? Autant ses félicitations professionnelles me ravissaient autant sur
un plan personnel en dehors de mon intelligence, j'étais embarrassée.
Mais comme j'ai été bien élevée, j'ai répondu
"merci" tout en passant à autre chose de plus professionnel.
Mais il a continué à me parler de son admiration pour ma personne
tout entière.
Je n'étais pas insensible au fait qu'il me trouvait belle et qu'il
me montrait son admiration. Il s'en rendait bien compte.
Mon mari ne me disait plus que j'étais belle depuis longtemps. J'étais
encore jeune mais l'accouchement avait fait des ravages sur mon corps et j'en
étais très complexée. Je ne me trouvais plus jolie. Le
coiffeur avait massacré mes cheveux. Mon ventre était gros et
mou, mes seins tombaient. J'avais des vergetures. J'étais catastrophée
par mon corps. Il me trouvait belle alors qu'il ne m'avait pas vu nue. Mais
je me disais que, même s'il me voyait comme je me voyais ou comme mon
mari pouvait me voir, je serais encore belle par rapport à sa femme
bien plus âgée que moi de toute façon. Et puis, lui ne
m'avait pas connue avec un corps presque parfait. Il ne pouvait pas regretter
ce qui n'existait plus et faire des comparaisons avec le passé.
Il a commencé à me parler d'autre chose que de travail, faisant
des pauses qu'il estimait méritées, pour mieux reprendre le
travail ensuite. Il m'a fait des confidences sur sa vie. J'ai commencé
à en faire autant car je n'étais pas heureuse. Mes parents me
manquaient. Je me sentais seule. Je n'arrivais pas à parler sexualité
avec mon mari car je bloquais complètement sur ce sujet.
Un ami
Au départ Michel m'a fait comprendre que je pouvais
lui faire confiance, qu'il était un ami pour moi et que je pouvais
tout lui confier car il avait de l'expérience et pouvait m'aider à
surmonter mes difficultés. Mais je me suis rendue compte qu'il cherchait
à me séduire puisqu'il me répétait combien j'étais
belle et combien je lui plaisais.
Il plaisantait surtout aussi beaucoup, me racontant des blagues. S'il allait
trop loin dans ses plaisanteries et que je l'arrêtais, il me disait
qu'il plaisantait en rigolant et que je ne devais pas m'en offusquer. J'ai
fini par plaisanter à mon tour car je ne voulais pas passer pour une
puritaine. J'avais peur d'être prise pour une gruge, une idiote qui
ne sait pas grand chose de la vie avec un cerveau et une vision étroite
des choses. Je voulais au contraire passer pour une femme libérale
et libérée ce que je n'étais pas.
Cependant, j'arrivais sur un terrain glissant. Je me suis demandée
ce que je devais faire ? J'aurais pu le remettre froidement à sa place
mais j'ai eu peur de le vexer. Je me suis dit que si je le froissais comme
il avait l'air un peu sensible, nos relations en souffriraient et je ne voulais
pas de tension dans nos relations professionnelles. Je tenais énormément
à mon travail car je m'y étais beaucoup investie. C'était
ma 2ème famille. Et je tenais beaucoup à ses compliments, à
ses encouragements.
J'avais même imaginé qu'un jour, nous pourrions venir mon mari
et moi avec notre fils faire un barbecue dans le jardin, le dimanche. Je m'imaginais
en train de planter des fleurs
J'avais l'impression de ne pas vraiment existée dans ma vie privée,
d'être transparente. Je me sentais plus utile au travail et j'y étais
presque mieux, moins inquiète comme si là je savais être
à la hauteur alors qu'en tant que mère je n'avais pas cette
impression.
J'avais de l'importance aux yeux de Michel. Et je ne voulais pour rien au
monde le décevoir ou le froisser.
Je lui ai dit que j'étais mariée, que j'aimais mon mari et que
j'avais juré fidélité en me mariant. Je lui ai prôné
les vertus de la fidélité pendant qu'il me parlait de toutes
ses expériences. Il me disait qu'il avait eu beaucoup de maîtresses,
qu'il avait beaucoup d'expériences dans ce domaine, qu'il connaissait
bien les femmes et que lui savait comment faire plaisir et rendre une femme
heureuse.
Quand il me serrait la main pour me dire bonjour ou au revoir, il retenait ma main dans la sienne plus que normalement en me regardant dans les yeux.
Demande d'explication
Comme je n'aime pas les situations confuses, un jour j'ai pris mon courage à deux mains, j'ai attrapé le téléphone et lui ai demandé s'il pouvait m'accorder du temps car j'avais à lui parler. Je suis montée dans son bureau au 1er. Je ne savais pas comment commencer. Je lui ai fait remarquer que je m'étais rendue compte de son attitude à mon égard trop gentille, de ses plaisanteries, de ses regards... Je lui ai demandé s'il n'était pas tombé amoureux de moi ou quelque chose comme ça ou s'il ne souhait pas ainsi aller plus loin. Je voulais crever l'abcès, ce petit jeu du "chat et de la souris" m'inquiétait plutôt qu'il ne m'amusait.
Il n'a pas nié. J'ai tenté de le raisonner. Je voulais que les choses soient claires. Je lui ai dit que j'étais mariée, que j'aimais mon mari, que je n'avais pas l'intention de le tromper. Il m'a parlé de ses sentiments pour moi ou plutôt il m'a parlé d'une amitié amoureuse.
Il m'a dit que je n'étais pas heureuse, pas satisfaite, que lui pourrait m'apporter tout ce qui pouvait me manquer, que j'en avais besoin pour mon équilibre...
Bref j'avais, selon lui, besoin de lui pour être complète, pour être une vraie femme.
Je lui ai dit que je voulais rester fidèle à mon mari et que ça n'enlevait rien de son charme (toujours la peur de le vexer) et que si je refusais ses avances ce n'était pas de sa faute. Il n'avait rien à se reprocher.
J'ai commis l'énorme erreur de lui faire croire que je n'étais pas insensible à son charme - alors qu'à ce moment-là il me laissait froide - pour ne pas le vexer.
J'avais peur qu'il change d'attitude à mon égard de façon trop radicale et désagréable pour moi. Je savais que je ne l'aurais pas supporté.
Il m'a dit qu'il comprenait mes scrupules mais qu'il avait tout son temps !
Je n'ai pas aimé son arrogance ! Il faisait celui qui sait tout sur tout. Non pas celui qui a une opinion sur tout mais celui qui sait tout de la vie.
Comme si moi, à cause de mon âge et de mon inexpérience, je ne savais rien et que lui avait raison et que je ne pouvais que me tromper. Il avait tout son temps pour me persuader qu'il avait raison. Il savait mieux que moi ce qui était bien pour moi. Malheureusement, j'ai fini par douter et me demander s'il avait raison.
Sa femme
Il me disait qu'il n'était pas heureux dans son
couple mais qu'il ne divorcerait jamais.
J'ai vu sa femme deux fois. Une petite femme du même âge que lui,
blonde, mince, sèche. Un véritable " adjudant chef "
qui me donnait l'impression de le mener à la baguette et lui qui subissait
sans rien dire. Je crois qu'elle était expert-comptable et elle est
venue vérifier la comptabilité. Il avait besoin d'elle mais
il était clair que dans leur couple, c'était elle qui commandait
et sur un ton très sec. Elle lui a même demandé devant
moi d'aller lui faire une course ménagère. Il a obéi
sur-le-champ alors qu'il était presque le PDG ! J'étais sidérée.
Il m'a fait de la peine.
J'ai commencé à éprouver pour lui de la tendresse.
Petit à petit, il a accentué " ses marques de propriétaire
" et à me façonner à son état d'esprit.
Il m'a donné des détails sur ses expériences sexuelles
tout en rigolant et moi j'écoutais car je n'en avais que si peu. J'étais
curieuse mais en même temps je n'approuvais pas. Je le lui disais que
ça ne lui servait à rien de tromper tout le temps sa femme comme
ça, que la solution était ailleurs.
Impuissant
Il n'arrêtait pas de me dire qu'il n'était
pas impuissant et je ne comprenais pas pourquoi il insistait là-dessus
car je n'avais pas remis sa virilité en cause. Il m'a dit que je devrais
prendre des amants, que ça me ferait du bien, que je manquais d'expérience,
qu'après ça irait mieux avec mon mari
évidemment
il s'est proposé d'être mon amant.
J'ai refusé mais il m'a répondu qu'il avait tout son temps et
que je finirais pas craquer.
Et puis il voulait d'abord me connaître car il avait
peur du sida. C'était la raison pour laquelle il n'avait plus de maîtresse
depuis 5 ans environ. Il ne voulait pas utiliser de préservatifs mais
ne voulait pas prendre de risque non plus.
Je lui ai dit qu'il perdait son temps car je ne deviendrais jamais sa maîtresse,
non pas parce qu'il ne me plaisait pas, je n'ai pas osé le lui dire,
mais parce que j'étais fidèle à mon mari.
Cela faisait 7 ans que nous vivions ensemble mon mari et moi et je n'avais
jamais eu d'écarts de conduite.
Je l'ai écouté me raconter ses confidences. Je l'ai laissé
mettre sa main sur mon épaule en signe d'affection ou me toucher un
peu les cheveux. Je n'ai jamais osé le remettre à sa place.
Je me disais que si je le faisais ma vie professionnelle risquait de devenir
difficile.
Donc j'ai commencé à entrer dans son jeu. J'ai plaisanté
avec lui. Il m'impressionnait énormément et je l'admirais un
peu mais surtout sur un plan professionnel qui débordait sur un plan
personnel.
Il m'affirmait que j'allais céder, que je craquerais, que c'était
une question de temps mais qu'un jour il m'apprendrait tout ce qu'il savait.
Que sinon j'allais louper quelque chose d'extraordinaire et que j'allais le
regretter.
Début mars 1989
Je ne savais pas à qui me confier. Tous les autres
salariés étaient des ouvriers en dehors d'un jeune commercial
qui était souvent en déplacement. J'ai été tentée
à plusieurs reprises d'en parler à mon mari mais je me suis
dit qu'il allait me demander de démissionner et je ne le voulais à
aucun prix. Je me suis dit que j'étais assez forte pour résister
à ses assauts de séduction.
Le 1er baiser fin 2ème semaine de mars
Le lendemain, un vendredi soir, après avoir passé
toute la journée à me demander si j'allais l'embrasser ou pas
car j'en avais envie, je suis partie. Il était très tard et
j'avais travaillé plus de 10 heures d'affilée ce jour là,
accumulant beaucoup de stress. Quand j'ai voulu monter dans ma voiture, je
me suis dit : " je ne vais pas rester tout le week-end comme ça
? "
Je voulais savoir l'effet que ça me ferait s'il m'embrassait. Je m'imaginais
bêtement Vivian Leigh et Clark Gable dans " Autant en emporte le
Vent ". Je suis retournée sur mes pas. Je suis rentrée
dans la maison. Il était là. Il m'a regardée. Je l'ai
regardé fixement. Il m'a prise dans ses bras et m'a embrassée.
Le fantasme est devenu réalité. Il n'y a rien de pire pour un
fantasme que d'être réalisé. Adieu Vivien Leigh et Clark
Gable. J'ai eu l'impression qu'une limace se posait sur mes lèvres
et je me jugeais vraiment ridicule. Qu'est-ce que je foutais là ? ?
?
Je l'ai rapidement repoussé poliment en lui disant que nous étions
en train de commettre une énorme bêtise, que je le regrettais
et que j'étais navrée.
Il m'a rassurée aussitôt me disant qu'il comprenait. Il s'est
mis à me tutoyer mais j'ai continué à le vouvoyer. Il
m'a dit que j'avais raison, qu'il valait mieux continuer à nous vouvoyer.
Par la suite, il m'a dit qu'il trouvait ça plus érotique.
Comme c'était fini, il m'a supplié de lui accorder un dernier
baiser. Le piège s'est refermé.
Je n'ai pas su le lui refuser.
Il a compris que je ne savais pas dire "NON".
Il m'a embrassée à nouveau et j'ai mis fin à ce baiser
qui me répugnait. Alors il s'est laissé glissé tout en
long de mon corps pour s'agenouiller à mes pieds, m'entourant de ses
bras, mettant sa tête dans mes jambes dans un signe d'adoration. J'étais
horriblement gênée. Je ne savais pas quelle attitude adoptée.
Lui caresser les cheveux ? M'en aller en le laissant tomber ?
J'étais morte de honte et je n'ai pas réagi.
J'ai attendu sans faire un geste comm esi j'étais morte ! Il a fini
par se relever et je me suis sauvée.
Une heure après je repensais à son baiser et à toute
la passion qu'il avait pour moi. Ça me faisait un drôle d'effet.
Le lundi matin, je suis retournée travailler. J'étais morte
de honte. Je regrettais vraiment de m'être mise toute seule dans une
pareille situation. J'ai essayé d'être froide.
Il m'a fait comprendre qu'il était fou de moi. Il avait des sentiments
pour moi. J'étais pour lui quelqu'un d'extraordinaire. Il y avait longtemps
que je n'avais pas été extraordinaire pour qui que ce soit !
Ses paroles me tournaient la tête car il était mon patron, socialement
supérieur à moi et qu'il avait 23 ans de plus que moi
Il a tout fait pour que je lui abandonne un autre baiser puis au autre. Ça
lui donnait l'énergie pour mener à bien sa mission de diriger
cette entreprise. Il avait besoin de moi.
Il me disait qu'on ne faisait de mal à personne.
Personne n'en saurait jamais rien.
Il m'a demandé si j'avais l'intention de quitter mon mari. Je trouvais
sa question absurde ! Il s'attendait de toute façon à une réponse
négative. Il m'a dit que nous étions tous les deux adultes et
que nous ne quitterions ni l'un ni l'autre nos conjoints respectifs, qu'ils
n'en sauraient jamais rien donc que personne n'en souffrirait.
Ce qu'il ne me disait pas et ce que j'ignorais c'est que la personne à
qui j'allais faire le plus de mal et que j'étais à cent lieux
d'imaginer un tel scénario, c'était à moi-même
!
Je me suis manquée de respect tout simplement en acceptant d'aller
dans ses délires.
Il se plaisait à vivre des expériences que je trouvais perverses.
Pour lui c'était normal. Il voulait tout essayer.
Il m'a même raconté qu'un jour il avait pour maîtresse
une mère et sa fille. Il descendait les escaliers d'une maison pour
aller à une réception et il s'était débrouillée
pour mettre la main au derrière de l'une et l'autre main ailleurs à
l'autre femme sans qu'aucune des deux ne s'en aperçoive. J'étais
choquée d'une telle attitude mais lui était fier de son exploit
et je n'allais pas casser son jouet. Il était si fier de ses exploits
!
J'essayais d'argumenter en faveur de la fidélité et des valeurs
morales qui me paraissaient importantes. Mais il n'avait de cesse que de me
faire changer d'avis.
Il n'était pas question d'avoir des relations sexuelles. Il ne le souhaitait
pas. Il voulait attendre, je n'étais pas prête et il préférait
attendre plusieurs mois s'il le fallait. Il se rendait compte que s'il avait
" chargé " je me serais enfuie.
Pour lui on ne faisait rien de mal. C'était juste un échange
de tendresse. On ne faisait que flirter rien d'autres, juste des baisers,
des câlins affectueux, rien de plus.
J'ai commencé à entrer sérieusement dans son jeu et avoir
avec lui une joute verbale érotique ce qui ne me ressemblait pas vraiment.
Il était ravi. Il voulait tout savoir de moi et je n'hésitais
pratiquement pas à tout lui dire comme je le faisais lorsque j'étais
enfant avec ma mère. Je pense qu'il voulait tout savoir pour mieux
me manuvrer, me posséder. Mais c'était surtout mental.
Une possession mentale.
Il voulait m'entraîner avec lui, dans la réalité, dans
ses fantasmes pervers. Il souhaitait que j'accepte de faire l'amour avec lui
et une autre femme. Où était le mal ? Pour lui il n'y avait
que du plaisir et de la tendresse, rien d'autre. J'essayais d'imaginer la
scène mais ça coinçait ! Ce n'était pas du tout
mon style. Je ne l'avais jamais fait et je ne savais pas si j'en étais
capable même pour lui faire plaisir. Mais je n'étais pas loin
de craquer et d'accepter.
Le moule
J'essayais de changer mon état d'esprit pour être
conforme à ce qu'il attendait de moi. Je le trouvais tellement gentil.
Je voulais qu'il continue à être fier de moi. Comme un père
pour sa fille. Je voulais coller au personnage qu'il imaginait comme partenaire
professionnel et sexuel. Il voulait me façonner à son image
pour que je sois parfaite à ses yeux et je ne voulais pas le décevoir.
Cela aurait été terrible car il m'admirait et je ne pouvais
plus me passer de la confiance professionnelle qu'il m'accordait. C'était
la 1ère fois qu'on me donnait carte blanche comme ça pour organiser
un service. J'avais des responsabilités qui me plaisaient et que j'assumais.
J'avais l'impression d'être enfin quelqu'un d'important et j'en avais
besoin.
Il m'a avoué qu'il m'avait embauchée parce qu'il avait pensé
qu'avec moi il pourrait aller loin, que je serais à la hauteur de ses
ambitions. Il m'avait embauchée uniquement dans le but de faire de
moi sa partenaire à la fois professionnelle et sexuelle. Cela me faisait
bizarre d'entendre ça. Il me faisait des confidences qui ne faisaient
pas toutes plaisir mais je lui étais reconnaissante de me faire confiance
à ce point.
Dans la journée il n'était pas rare que je monte dans son bureau
pour lui soumettre une lettre à signer et pendant qu'il la lisait,
je mettais mes bras autour de son cou et je l'embrassais sur la joue, sur
les cheveux très tendrement.
Je crois que j'aurais aimé embrasser mon père ainsi.
La tendresse que j'éprouvais pour lui et que je lui témoignais
régulièrement s'est transformée au point que je me suis
cru amoureuse de lui. J'ai voulu rompre plusieurs fois, arguant que ce n'était
pas raisonnable mais à chaque fois il s'est débrouillé
pour faire tomber mes défenses.
Sa jalousie
Un jour il nous a payé le Mc Do au jeune commercial
et à moi. Lui-même détestait les fast-food. Il faisait
donc un immense effort pour nous remercier de notre travail. Nous avons mangé
sur l'herbe. Le commercial était sympa et il me faisait rire.
Par la suite Michel s'est empressé de me punir gentiment en me grondant
de mon attitude trop sympathique vis-à-vis du jeune commercial. Il
était jaloux. Je crois que ça m'amusait. Je lui ai fait remarquer
que c'était étrange pour quelqu'un qui avait des maîtresses
A la fin du mois il m'a parlé de ses projets pour
nous deux. Il voulait m'acheter des vêtements dignes de moi. Il me voulait
en tailleur de marque, avec de la lingerie fine de luxe. Il voulait m'acheter
des cadeaux mais je refusais qu'il m'achète des bijoux. Comment aurais-je
pu justifier une bague aux yeux de mon mari ?
Le week-end, Michel s'est mis à me manquer. Il me tardait le lundi
pour le retrouver et ça commençait à me poser problèmes.
J'avais l'esprit ailleurs et je souffrais.
D'un côté je souffrais car je menais une double vie et ce n'était
pas ce que j'avais imaginé pour moi et il m'était difficile
de cacher tout ce que je ressentais à mon mari car je ne lui avais
jamais rien caché. D'un autre côté, j'avais enfin l'impression
de me sentir existée, d'être importante pour quelqu'un !
J'espérais que mon patron se lasserait mais il n'en était rien
et il n'acceptait aucune rupture raisonnable.
Masturbation
Un matin il m'a dit que la veille au soir après
mon départ il s'était masturbé dans les toilettes en
pensant à moi. Il voulait que j'en sois fière.
Il me racontait tout ce qu'il faisait par rapport à moi.
Il me disait qu'il recommençait à faire l'amour à sa
femme grâce à moi car il s'imaginait que c'était à
moi à qui il faisait l'amour. Il cherchait à me faire envie,
à me rendre jalouse en me donnant des détails. Je n'aimais pas
cette idée car j'avais le sentiment de faire souffrir une femme qui
ne m'avait rien fait. Mais il me disait à quel point elle était
contente, qu'elle en redemandait
Que pouvais-je dire ? Tout le monde avait l'air d'y trouver son compte ?
Il me disait que toutes ses conquêtes avaient été des
femmes sublimes car il ne voulait pas se contenter de la facilité.
Ce qui le motivait dans la vie c'était de faire capituler les plus
belles femmes. Il voulait les posséder. Comme si ça allait le
rendre plus important. J'avais de la peine pour lui et encore plus de tendresse
comme si je pouvais le guérir des blessures qu'il avait pu avoir et
qui le menait à prendre une telle attitude pour se prouver qu'il valait
quelque chose. Il avait un lourd contentieux avec son père qui l'avait
humilié pendant des années mais il refusait d'en parler davantage.
Son âge aussi lui faisait peur et il m'en a parlé. Il allait
faire 50 ans et il voulait " terminer " sa carrière en beauté.
La note
Il disait que j'embrassais divinement bien et il me donnait
la meilleure note par rapport à toutes ses maîtresses alors qu'il
n'avait pas encore fait l'amour avec moi. Je crois qu'il m'avait mis 15/20
!
Je ne me rendais pas compte qu'il m'infantilisait avec sa note !
Il tissait sa toile autour de moi pour façonner son esprit au sien.
J'étais tellement influençable ! Il faisait tout pour devenir
indispensable à ma vie de telle sorte que je ne puisse plus me passer
de lui.
Faire l'amour
Il ne voulait pas faire l'amour avec moi avec un préservatif
et moi il n'était pas question de prendre le risque de ramener quoi
que ce soit comme maladie éventuelle à mon mari. Je pouvais
m'imaginer dans les bras de Michel, pas en train de tuer mon mari.
En fait, son jeu pervers c'était de me séduire et de faire monter
la pression jusqu'à ce soit moi qui craque et qui le supplie de me
faire l'amour.
Mais je pense que si j'avais pu le voir même torse nu, je me serai sauvée.
Il savait que son charme n'était pas là. Il voulait se rendre
moralement indispensable pour moi pour qu'au bout du temps, j'en oublie son
physique ingrat !
Il m'a dit qu'il voulait acheter un appartement pour nous deux. Il voulait
m'emmener dans de grands magasins pour m'acheter plein de beaux vêtements.
Je me souviens lui avoir acheté une paire de chaussettes sympa mais
comme je m'étais sentie coupable par rapport à mon mari, j'avais
offert la même paire à mon mari.
Vélisy II : début avril 1989
Michel m'a demandé de venir un samedi matin au travail.
Il y serait, m'attendrait et m'emmènerait à Vélisy II,
un grand centre commercial.
Pour cela, je devais mentir et ça me répugnait.
Mais le samedi matin, mon mari travaillait. Mes parents étaient montés
à Paris pour ramener leur petit-fils une quinzaine de jours chez eux.
J'avais l'impression que mes parents ne venaient pas me voir mais venaient
voir leur petit-fils. Il était une merveille pour tout le monde et
tout le monde s'extasiait devant lui.
J'aimais mon fils mais je souffrais de passer ainsi au second plan.
J'ai décidé de rejoindre Michel pour qui j'existais.
Vers 9h00 j'ai débarqué à la société, prétextant
à mes parents que j'avais du travail à finir et que je serais
là vers midi avant le retour de mon mari prévu vers 13h00.
Michel a été surpris de me voir car il ne s'y attendait pas.
Il n'était pas en costume pour une fois, mais était habillé
de manière décontractée.
Il m'a emmenée à Vélisy II m'a montré toutes les
vitrines. J'ai dû essayer des vêtements mais j'ai tout refusé.
J'ai voulu rentrer mais nous sommes tombés dans les embouteillages.
Je suis rentrée très tard chez moi. Mes parents se demandaient
ce que je faisais.
Ils sont partis en emmenant le petit avec eux. Michel me manquait comme le
week-end dernier et je me suis dit que j'avais enfin mon mari pour moi toute
seule, qu'on allait pouvoir redevenir des amoureux comme avant et que j'allais
tout gâcher si je me laissais à souffrir de l'absence de Michel.
J'ai pris la décision ce dimanche-là de rompre.
Etait-je ça ce que j'attendais de moi ? Une femme entretenue ? Je méritais
mieux non ? J'étais pourtant idéaliste et là, ce que
j'étais en train de devenir, si ça correspondait à ce
qu'il attendait de moi, ça ne correspondait pas à mes idéaux.
Je ne voulais pas devenir une prostituée.
Je tenais à mon mari et je ne pouvais pas rester ainsi à me
poser autant de questions. Si je ne faisais pas souffrir mon mari, moi je
souffrais. Etais-je en train de le tromper, de le trahir ? Michel me soutenait
que non tant qu'il n'en saurait rien !
Etait-ce bien ou mal ce que je faisais ? Ou était la limite entre le
bien et le mal ?
Etais-je vraiment amoureuse de Michel ? Pouvais-je réellement aimer
deux hommes en même temps ?
Pouvais-je laisser Michel envahir mon cerveau ainsi, laisser sa passion me
dévorer ?
Ma double vie me faisait souffrir. Je me sentais perdue et personne ne pouvait
écouter mon histoire sans me jeter la pierre, sans me juger durement.
La rupture
J'ai repris le travail le lundi matin avec la ferme intention de rompre définitivement et je ne suis pas revenue sur ma décision. Il était tout dépité. Il ne comprenait pas. Je lui ai demandé d'être mon ami. Je ne voulais pas le perdre, pas perdre l'affection qu'il avait pour moi mais je refusais de tromper davantage mon mari. Toute la journée, il m'a demandé de revenir sur ma décision. Il m'a dit que je ne tiendrais pas, que j'allais passer à côté de quelque chose d'extraordinaire que lui seul pouvait m'apporter Pour lui ce n'était qu'un caprice et ça allait passer. Il s'est mis à me harceler pour que je cède.
La femme d'un seul homme
Il m'a sorti comme argument que je n'étais pas la
femme d'un seul homme et qu'un seul homme ne pouvait pas me rendre heureuse
car j'étais trop exceptionnelle ! Il savait que j'étais passionnée.
Il a réussi à me mettre le doute et je me demandais s'il n'avait
pas raison !
Le soir je craquais et je commençais à parler à mon mari
de l'attitude de mon patron me gardant bien de lui avouer que j'avais flirté
avec lui. Je cherchais aussi à savoir si j'avais raison, si j'avais
tort. Où était la limite entre le bien et le mal ?
Mon mari m'a mise en garde. Je devais être ferme vis-à-vis de
mon patron.
Mardi : chantage affectif, harcèlement
Mais le mardi, la journée a été pire. Michel comprenait que je ne cédais pas et qu'il allait peut-être perdre la partie. Je refusais ses baisers, je me débattais dés qu'il essayait de m'attraper ou de poser ses lèvres sur les miennes, dès qu'il essayait de caresser mon bras alors il a essayé le chantage affectif. Il m'a rappelé qu'il m'aimait. Il m'a reproché de le faire souffrir, d'avoir une attitude perverse, d'avoir tort d'agir comme ça. Il pensait au début que c'était un jeu mais que ça durait depuis trop longtemps. Mais j'étais ferme et je reprenais mon travail à chaque fois en le repoussant. Il s'est fait de plus en plus insistant et j'étais malheureuse car je le voyais malheureux. Je ne savais plus quoi faire car il insistait énormément. Il n'osait plus sortir voir la clientèle car il était surtout commercial et il devait démarcher les clients. Il voulait rester constamment avec moi jusqu'à ce qu'il soit rassuré, jusqu'à ce que je cède mais je ne voulais pas céder. J'étouffais. J'avais l'impression que j'allais me noyer et j'avais besoin d'aide de toute urgence.
Le drame : mon mari
Le soir je racontais à nouveau à mon mari
ce qui se passait. Je cherchais une solution.
Mon mari a vu rouge et a décidé d'aller lui demander des explications
sur son attitude et lui intimer l'ordre de me laisser tranquille. J'ai eu
peur ! Peur que mon mari apprenne ma tromperie, peur de perdre mon emploi
Je l'ai supplié de n'en rien faire mais je n'ai pas pu raisonner mon
mari car cela aurait signifié avouer ma part de responsabilité.
Je me sentais tellement coupable de cette histoire. Mon mari commençait
à se douter qu'il y avait quelque chose entre mon patron et moi et
il voulait en avoir le cur net. Je lui affirmais qu'il ne s'était
rien passé, que je n'avais pas couché avec lui. Je n'hésitais
pas à le lui jurer puisque c'était vrai.
Il m'a dit que si je n'avais rien à me reprocher, je devais le laisser
y aller pour qu'il dise à mon patron de me laisser tranquille. Il me
testait et je ne pouvais pas lui avouer ce qu'il en était.
Je pensais que tout ce qui arrivait était de ma faute. Je n'aurais
jamais dû laisser faire Michel, le laisser ainsi plaisanter sur des
sujets finalement douteux, lui laisser croire qu'il pouvait me séduire.
J'ai appelé mon patron aussitôt pour lui expliquer que mon mari
arrivait. Il m'a rassurée aussitôt me disant qu'il avait l'habitude,
que je n'avais pas à m'inquiéter, qu'il respectait mon mari,
qu'il le calmerait et qu'ils ne se battraient pas. Mon mari faisait une dizaine
de cm de moins et je ne souhaitais pas qu'ils en arrivent aux mains. S'ils
se battaient, je perdais mon emploi et je ne savais pas comment ça
allait finir.
Mon mari est revenu encore plus perdu car il ne savait plus qui croire. Michel
avait tout nié. Je pense qu'il a dû juste reconnaître que
je lui plaisais sans plus.
Pour convaincre mon mari de l'attitude de mon patron à mon égard
et qui m'égarait, j'ai fini par lui avouer que Michel me parlait de
ses expériences sexuelles et qu'il m'avait proposé de faire
l'amour avec moi ainsi qu'avec une autre femme !
Mon mari a vu rouge. Il m'a dit que s'il s'était permis de me faire
une telle proposition c'est que je l'avais laissé me séduire
et qu'il y avait quelque chose entre nous deux. Il m'a dit que je l'avais
trompé, que je lui avais menti. Il m'a dit qu'il ne me pardonnerait
jamais de l'avoir trahi ainsi, de l'avoir laissé aller voir mon patron
sans me dire la vérité et qu'il s'était ridiculisé
à cause de moi.
Il a fait sa valise et j'ai dû le supplier en pleurant de ne pas me
quitter. J'avais été assez forte pour rompre avec mon patron,
pour ne pas devenir sa maîtresse, ce n'était pas pour perdre
mon mari que j'aimais plus que tout au monde.
Il est resté et nous avons parlé pendant des heures et j'ai
pu lui dire que je n'étais pas heureuse. Il est tombé des nues.
Lui était heureux entre sa femme et son fils et il pensait qu'il en
était de même pour moi. Nous avons abordé le thème
de la sexualité et je lui ai dit que j'avais souvent l'impression qu'il
me violait quand, lasse, je finissais par céder à ses avances
pour avoir la paix.
Nous avons mis carte sur table cette nuit-là.
Nous avons convenu que je pouvais rester dans la société car
je ne voulais pas perdre mon emploi. Le chômage me faisait peur et surtout
c'était la 1ère fois qu'un travail m'intéressait autant.
Il m'a dit qu'il acceptait que je continue à travailler dans cette
société à la condition que Michel arrête de me
draguer et qu'il me donne un salaire en rapport avec mon grade et aux heures
supplémentaires que je faisais. Il estimait que j'étais son
esclave à travailler de la sorte. J'accumulais facilement 10h par semaine
en heures supplémentaires sans être payée en retour.
mercredi : augmentation refusée
Je crois que le mercredi, Michel a été pas mal en clientèle.
Je l'ai peu vu en dehors du début de matinée. Je lui ai demandé
de me donner un salaire correct, et je lui ai donné les conditions
de mon mari pour que je reste.
Il m'a dit qu'il y pensait déjà à m'augmenter mais qu'il
ne pouvait pas m'augmenter plus que 500 F. Je trouvais que ce n'était
nettement pas assez. Mon mari n'aurait pas accepté. J'aurais dû
gagner 8000 F brut par rapport à ma qualification, mon grade sans compter
mes heures supplémentaires. Il ne m'offrait que 7000 F en faisant un
effort.
Puis il a argué qu'il ne pouvait pas faire mieux pour le moment car
il ne pouvait pas augmenter tous les ouvriers. Je ne comprenais pas ce que
ça avait à voir. S'il m'augmentait personne n'en saurait rien,
du moins pas les ouvriers.
Et puis ce n'était que justice.
Puis il m'a dit qu'il ne pourrait pas s'empêcher d'essayer de me récupérer
et qu'il ne pourrait pas arrêter son attitude envers moi.
J'ai téléphoné à une société qui
m'avait proposé un emploi une dizaine de jours auparavant. Le poste
était toujours libre et j'allais être payée 8000 F brut.
J'ai mis mon patron au pied du mur. Ou il m'augmentait pour rassurer mon mari
et il cessait son comportement ou je démissionnais.
Il n'y croyait pas.
Harcèlement sexuel
J'ai rencontré la secrétaire de la société
mère qui m'a invitée à manger avec elle. Je lui ai tout
avouer malgré la honte que je ressentais. Je lui ai tout raconté
et même ma participation, le fait que j'étais amoureuse de lui
mais que je voulais cesser cette relation coupable.
Elle m'a dit que je subissais un " harcèlement sexuel ".
Elle m'a donné l'adresse de son psy car le mien ne me convenait décidément
pas. J'accumulais les erreurs sans discerner le bien du mal pour moi.
J'ai annoncé à Michel le jeudi que je démissionnais.
Il refusait de changer d'attitude et de m'augmenter pour que j'aie un salaire
décent.
Il pensait que j'allais revenir sur ma décision. J'en ai parlé
aux autres ouvriers surtout le plus ancien qui venaient de la société
mère car il me voyait pleurer. Il ne comprenait pas que je pleurais
si j'avais pris la décision de partir pour un travail mieux rémunéré.
Je savais que le travail en question était beaucoup moins bien intéressant.
J'étais très malheureuse. Michel n'arrêtait pas d'essayer
de me faire revenir sur ma décision. Il m'a dit que c'était
moi qui avais tout organisé dans cette société, que tout
était mon uvre, que j'avais galéré et que j'allais
commencer à respirer et que j'allais tout laisser pour une autre qui
ne le méritait pas. On avait galéré ensemble pour monter
cette société qui marchait bien, on devait rester ensemble jusqu'au
bout.
J'avais promis à mon mari de démissionner s'il ne m'augmentait
pas de 1000 F preuve de sa bonne foi pour revenir à un comportement
normal. Mon mari pensait qu'il m'exploitait.
Je ne pouvais pas revenir sur la parole que j'avais donnée à
mon mari.
Je suis partie un vendredi en larmes et j'ai embauché le lundi ailleurs.
J'ai dû revenir deux fois pour récupérer des affaires
et des papiers. La première fois, j'ai pu voir ma remplaçante.
Il m'a montré qu'il était heureux de me voir. Il me disait que
j'allais revenir dans 15 jours, que je n'allais pas tenir, que j'allais regretter.
Il a essayé de m'embrasser mais j'ai refusé. Il m'a dit qu'il
me trouvait très belle. Très classe ! Je lui ai fait croire
que j'étais bien là où j'étais.
Vengeance
Alors il a voulu se venger en me disant que finalement
je n'étais si bien que ça professionnellement parlant. Il disait
que ma remplaçante et lui avaient relevé des erreurs que j'avais
commises.
Mais il ne m'a pas montré mes erreurs. Il voulait juste semer le doute
dans mon esprit pour me faire mal. Je suppose qu'il avait mal mais c'était
surtout son orgueil qui était mis à rude épreuve car
il avait joué et il avait perdu ! Et il n'acceptait pas de perdre !
Je suis partie en essayant de cacher mes larmes. Je commençais à
avoir des doutes sur mes capacités professionnelles.
Deux secrétaires pour me remplacer
Lorsque je suis revenue la deuxième fois, très froide et très digne, je me suis rendue compte qu'il m'avait remplacée par deux femmes. Une seule n'avait pas suffi. J'étais contente de voir que finalement j'étais valable sur le plan professionnel et que mon travail n'avait rien à voir avec ce qu'il avait dernièrement prétendu.
C'est la dernière fois que je l'ai vu. Il est resté
narquois. Il avait l'air de s'amuser au chat et à la souris, cherchant
à savoir ce que ma froideur cachait. Il s'interrogeait pour savoir
si j'étais heureuse dans ma nouvelle situation professionnelle et si
je ne regrettais pas. Je suis restée très digne jusqu'au bout.
Il avait dû installer la 2ème secrétaire dans son propre
bureau faute de place. Je me demandais s'il avait des vues sur elle mais ça
ne me regardait plus.
Il m'a envoyé un courrier officiel sans mot d'accompagnement. Il ne
m'a jamais téléphonée et ne m'a jamais relancée.
J'ai compris qu'il m'avait menti lorsqu'il m'avait fait croire qu'il m'aimait.
Par la suite, j'ai repris la natation pour perdre mon ventre qui me complexait
et je me suis mise pour la 1ère fois de ma vie, au régime.
Mes cheveux ont repoussé et lorsque 3 mois plus tard, mon mari m'a
prise en photo avec un chignon (mariage de mon frère) j'ai eu envie
de la lui envoyer car c'était ma vengeance à moi. Il rêvait
que mes cheveux repoussent pour justement les relever en chignon. J'aurais
voulu lui montrer ce qu'il perdait !
Mais la vengeance ne sert qu'à détruire l'auteur de la vengeance
bien plus que la personne visée et je n'ai rien fait.
Les regrets
Je ne peux pas dire que je regrette ce qui s'est passé même si je m'en suis voulue longtemps d'avoir fait souffrir mon mari. Je me suis rendue compte que j'étais plus victime que coupable. Victime de sa manipulation. Je n'avais été qu'un jouet entre ses mains et il avait voulait jouer avec moi et moi au lieu de garder mes distances, j'avais développé des sentiments pour lui. Je n'étais pas sa première victime puisqu'il m'avait dit que c'était sa façon d'être et qu'il agissait ainsi depuis toujours.
Mes erreurs m'ont permis de réfléchir et de comprendre ce qui n'allait pas et d'avoir le courage de changer les choses pour que ça marche mieux.
Il ne faut pas confondre sa vie privée et sa vie
professionnelle ni sa valeur personnelle et la valeur que l'on peut nous accorder
au niveau professionnel.
Ce n'est pas donné comme ça de savoir dire " non ",
de prendre le risque de déplaire, de comprendre rapidement que la personne
cherche à nous manipuler.
Je pense que maintenant je sais.
Aucun patron n'a cherché depuis cette histoire à abuser sexuellement
de moi.
J'ai vécu une histoire de séduction, d'emprise,
de manipulation mais je ne pense pas qu'il y a eu harcèlement sexuel.
Je me demande cependant ce qui se serait passé si je n'avais pas trouvé
immédiatement un travail. Je n'aurais pas pu être prise en charge
par les Assédic donc je n'aurais peut-être pas pu démissionner
tout de suite et j'aurais sans doute vécu l'enfer avec cet homme. J'aurais
vécu un harcèlement sexuel peut-être et j'aurais été
licenciée sous un prétexte bidon. J'aurais eu du mal à
m'en remettre. Il aurait tout fait pour me briser, pour se venger de lui avoir
dit " NON ".